Résumé.– La chirurgie des varices essentielles des membres inférieurs repose sur un bilan préopératoire
clinique et par échodoppler. Ce bilan précise le stade évolutif, la topographie des veines superficielles
refluantes, les points de reflux et l’état de la circulation veineuse profonde. Le traitement chirurgical
cherche à supprimer les points de reflux et les veines superficielles variqueuses tout en épargnant les axes
saphéniens non ou peu refluants. Pour les varices des territoires saphène interne et saphène externe, la
technique opératoire de base est la crossectomie avec éveinage. La recherche de gestes moins invasifs,
limitant les traumatismes nerveux associés, fait préférer les éveinages courts et les éveinages par
invaginations quand ils sont possibles. Les gestes associés peuvent être des phlébectomies type Muller et
la ligature de perforantes. Les indications opératoires s’appuient sur des études prospectives qui ont
montré l’importance de la crossectomie en cas de reflux ostial pathologique saphène interne ou saphène
externe. L’éveinage du tronc saphène interne a été discuté. Il a semblé améliorer les résultats en cas de
tronc saphène dilaté et refluant. La prévention de l’apparition de néocrosse saphène interne a diminué le
taux de récidive postopératoire. Un traitement chirurgical invasif et adapté à chaque situation clinique
doit être proposé pour améliorer les résultats et diminuer les séquelles de la chirurgie des varices.
Introduction
La chirurgie des varices a bénéficié, depuis environ 15 ans,
d’acquisitions nouvelles qui ont modifié ses techniques et ses
indications. C’est l’exploration par échodoppler des axes veineux
superficiels et profonds des membres inférieurs qui a été l’élément
déterminant de ces acquisitions, en particulier dans la physiopathologie
des varices [42]. Son utilisation en préopératoire a une place reconnue
par l’ANDEM pour la localisation des reflux, le marquage des
perforantes et l’exploration du creux poplité [1]. La chirurgie guidée par
le bilan préopératoire cherche à respecter chaque fois que possible les
axes saphéniens et à faire l’exérèse des seuls troncs veineux
incontinents [5]. Ceci a permis de limiter les séquelles douloureuses des
éveinages et d’éviter des interventions inutiles [40]. Cette chirurgie
d’exérèse est associée le plus souvent à une sclérothérapie postopératoire
qui complète les effets de l’intervention et minimise le risque de
récidives [10]. Les mécanismes d’apparition des varices sont divers et
nous voudrions limiter notre étude à la chirurgie des varices essentielles
correspondant à ce que Perrin [43] décrit comme l’insuffisance veineuse
superficielle par opposition à l’insuffisance veineuse profonde qui pose
d’autres problèmes thérapeutiques. Le propos de ce travail est de faire
une revue des méthodes chirurgicales applicables au traitement des
varices essentielles des membres inférieurs.
Bilan préopératoire
L’examen clinique reste l’élément de base de l’évaluation du
malade porteur de varices [7]. Dans un but de standardisation et
d’évaluation des traitements, il est préférable, à l’issue de l’examen
clinique, de classer l’insuffisance veineuse chronique (IVC) suivant
les recommandations de l’ANDEM [1] établies à partir des
recommandations du Ad Hoc Committee publiées en 1988 [45] et
réactualisées en 1995 [44]. Les malades sont classés à partir des
signes cliniques observés en deux stades. Le stade I regroupe les
malades asymptomatiques qu’ils aient ou non des varices (classe 0
du Ad Hoc Committee) et les malades porteurs de varices avec
oedème des chevilles ou dermite débutante (classe 1 du Ad Hoc
Committee). Le stade II ou IVC modérée à sévère regroupe les
malades avec troubles trophiques : dermite ocre, atrophie blanche,
fibrose sous-cutanée, hypodermite, ulcères cicatrisés ou non
(classes 2 et 3 du Ad Hoc Committee).
Dès que l’IVC associée aux varices est telle que l’on envisage un
traitement chirurgical, un examen par échographie-doppler de
préférence couleur (duplex) doit être demandé. Cet examen est
d’autant plus indispensable qu’il y a un doute clinique ou lors d’un
examen par doppler continu sur une insuffisance veineuse
profonde associée ou s’il s’agit de récidives de varices après
traitement chirurgical ou après sclérothérapie. L’échographie
doppler couleur visualise les obstacles sur les axes veineux
profonds. Elle permet de détecter et de quantifier le reflux dans
chaque veine [39].
Plusieurs études récentes ont insisté sur la fréquence des reflux
veineux superficiels dans le territoire saphène interne (tableau I),
même au stade II de l’IVC [30, 37]. Cependant, une dévalvulation
complète n’a été notée que dans 53 % des cas par Guex [23].
L’insuffisance du territoire saphène externe est moins fréquente.
Elle est plus souvent limitée à la crosse (tableau I). Labropoulos [31]
a montré la fréquence de l’atteinte associée des veines jumelles
interne ou externe ou de la veine de Giacomini. Par ailleurs, au
stade II, Nanraha [24] a insisté sur la fréquence du reflux veineux
profond et Zukowski [50] a montré la fréquence du reflux dans des
veines perforantes du mollet même en cas de varices essentielles.
Le reflux peut provenir d’autres territoires que les axes saphènes
et dans son étude, Guex a objectivé 11 % de reflux d’origine
pelvienne [23]. Les varices essentielles répondent donc à différents
types de reflux et il paraît illogique de vouloir leur appliquer un
traitement chirurgical standard. Pour chaque malade opéré une
étude clinique et par échodoppler préopératoire permettra de
choisir un traitement chirurgical adapté [37].
Les autres modes d’explorations sont rarement indiquées dans le
bilan de varices essentielles des membres inférieurs. La
phlébographie ascendante cherche les séquelles de thrombose des
axes veineux profonds et précise l’anatomie veineuse. La
phlébographie descendante évalue l’importance du reflux dans les
axes veineux profonds et permet de quantifier ce reflux selon les
quatre stades de Kistner [12]. La plétysmographie gazeuse et les
prises de pression veineuse ambulatoire sont indiquées dans
l’évaluation et le suivi de l’insuffisance veineuse profonde.
Préparation à l’intervention
ANESTHÉSIE
Si la chirurgie des varices est faite au cours d’une hospitalisation
conventionnelle, les éveinages saphène interne et saphène externe
sont le plus souvent réalisés sous anesthésie générale. La durée
d’hospitalisation peut être réduite à 24 ou 36 heures si
l’intervention est faite le jour de l’hospitalisation. Les anesthésies
rachidiennes ou péridurales imposent également une surveillance
de 24 heures. Elles ont l’inconvénient de ne pas permettre un lever
postopératoire précoce et d’exposer aux céphalées et aux rétentions
aiguës d’urine. L’anesthésie tronculaire par bloc sciatique et bloc
crural est facilitée par l’utilisation d’un neurostimulateur pour la
localisation des troncs nerveux [17]. Elle permet de faire des
éveinages saphène interne et saphène externe avec une bonne
analgésie. Elle est réversible en 4 à 5 heures. Giorgi [17] a utilisé un
mélange de lidocaïne (Xylocaïnet) et de bupivacaïne (Marcaïnet)
adrénalinées avec 90 % de succès. L’anesthésie locale par
infiltration permet les éveinages saphène interne, court ou long.
Elle nécessite l’infiltration de la crosse et du trajet de la veine
complétée d’une infiltration du nerf crural. Elle doit être couplée à
une technique d’éveinage peu traumatisante. Taylor [47] a utilisé de
la lidocaïne à 1 % avec un temps minimal d’analgésie de
60 minutes. Bishop [4] a utilisé avec succès de la bupivacaïne
adrénalinée à 0,25 % dans 87 éveinages saphène interne longs.
Creton [8] a fait 700 éveinages saphène interne par bloc crural à la
mépivacaïne (Carbocaïnet). La durée de l’analgésie a été de
3 heures. Le confort de l’intervention a été jugé excellent dans 95 %
des cas. La complication principale a été la survenue de malaise
vagal imposant l’injection d’atropine dans 38 cas. L’éveinage
saphène externe n’est pas possible avec cette méthode d’anesthésie
locale.
CHIRURGIE AMBULATOIRE
Les progrès de l’anesthésie locale et tronculaire permettent le
développement de la chirurgie ambulatoire des varices. Dans une
série portant sur 1 222 interventions faites en ambulatoire,
Gorny [21] a rapporté trois méthodes d’anesthésie. L’anesthésie
sélective de trajet consiste en l’infiltration avec de la lidocaïne de
la crosse et du tronc de la veine saphène interne. L’anesthésie de
zone où la technique précédente est complétée par un bloc crural.
L’anesthésie de trajet avec anesthésie générale par un flash de
propofol (Diprivant) fait au moment de l’éveinage. Les opérés sont
sortis 3 heures après l’intervention. Dans les éveinages saphène
interne, l’indice de satisfaction a été de 95 % après l’anesthésie de
zone et de 94 % après l’anesthésie de trajet avec flash d’anesthésie
générale. Les complications peropératoires ont été un malaise vagal
dans 35 cas, un choc vagal dans deux cas. La chirurgie ambulatoire
doit être réservée à des malades bien informés, volontaires et en
bon état général (ASA 1). Elle ne représente en France que 3 à 4%
des actes opératoires [21], mais elle va très probablement se
développer. Quelle que soit la technique utilisée, une consultation
d’anesthésie préopératoire est indispensable ainsi qu’un bilan
biologique, en particulier de coagulation.
PRÉPARATIONS CUTANÉE ET MÉDICAMENTEUSE
Il est préférable avant d’opérer des varices d’attendre la
cicatrisation des ulcères variqueux ou du moins d’attendre leur
détersion et le contrôle de toutes les surinfections cutanées
associées. Le rasage et la préparation cutanée, en particulier des
pieds et des plis inguinaux, sont faits la veille de l’intervention
avant le marquage des trajets veineux des crosses et des
perforantes. Ce marquage indispensable est fait par l’angiologue
ou le chirurgien au feutre non effaçable, sur un malade debout.
Une antibioprophylaxie est faite systématiquement au moment de
l’induction anesthésique.
Techniques opératoires
PRINCIPES DE LA CHIRURGIE DES VARICES
La chirurgie des varices doit suivre trois principes simples mais
d’application parfois difficile :
– supprimer les points de reflux du réseau veineux profond vers
le réseau veineux superficiel ;
– supprimer les veines superficielles variqueuses dont la sclérose
sera difficile du fait de leurs diamètres (plus de 4 mm) ou du fait
de leurs connections ;
– épargner les axes saphéniens non refluants. En effet, 3 % des
patients avec varices des membres inférieurs auront besoin d’un
pontage artériel [35].
CROSSECTOMIE AVEC ÉVEINAGE SAPHÈNE INTERNE
_ Crossectomie
L’incision d’abord de la crosse saphène interne est faite
parallèlement au pli inguinal, 1 cm sous le pli (fig 1). Elle débute
immédiatement en dedans des battements de l’artère fémorale et
mesure 4 à 6 cm de long. Chez les patients obèses, cette incision
est de même topographie, mais agrandie. Le tronc de la saphène
interne est disséqué et mis sur fil tracteur. Il est libéré vers le bas
sur 5 à 6 cmen sectionnant, après ligature, les collatérales situées à
ce niveau. La dissection est alors remontée vers la crosse, dans le
plan de l’adventice. Les collatérales de la crosse sont sectionnées
entre ligatures les unes après les autres. Leur nombre peut varier
de deux à dix [16]. Le segment d’amont de ces collatérales peut être
éveiné par traction progressive avec deux pinces de Halstead,
l’hémostase étant obtenue par l’étirement. La face antérieure de la
veine fémorale au-dessus et au-dessous de la crosse doit être
parfaitement identifiée (fig 1). L’artère honteuse externe, qui souscroise
habituellement la crosse, doit être respectée car sa ligature
pourrait être à l’origine d’impuissance sexuelle [25]. Les faces
latérales de la veine fémorale sont libérées sur quelques millimètres
pour chercher un abouchement anormal d’une veine abdominale,
d’une saphène antérieure de cuisse [16] ou d’une veine honteuse
externe [9]. La crosse est doublement ligaturée au fil résorbable au
ras de la veine fémorale. Lors de la fermeture de la plaie inguinale,
Glass [18] a recommandé de fermer le fascia cribiformis en avant du
moignon saphène par suture bord à bord ou par interposition d’un
patch en silicone. Cette technique diminuerait l’incidence des
récidives de varice par apparition d’une néocrosse saphène interne.
_ Éveinage par télescopage
Il a été décrit par Babcock en 1907 [2]. On utilise un stripper semirigide
avec olives amovibles de différents diamètres. Le passage
du stripper est fait de haut en bas. En cas d’impossibilité de
cathétérisme de la veine de haut en bas, elle est cathétérisée de bas
en haut en pensant aux risques d’engagement de la tête du stripper
dans les veines profondes par l’intermédiaire de veines
perforantes. L’abord inférieur de la saphène interne se fait par une
incision horizontale prémalléolaire de 5 à 10mm située à 3 cm audessus
de la pointe de la malléole interne. La saphène interne est
libérée du nerf saphène interne qui lui est accolé. Après ligature et
section de la saphène interne au niveau des deux incisions, on met
en place une olive à l’extrémité inguinale du stripper. Le diamètre
de l’olive est le plus petit qui soit compatible avec le diamètre de
la veine. L’éveinage est fait de haut en bas par traction sur
l’extrémité malléolaire du stripper (fig 2). L’éveinage de haut en
bas a l’avantage de minimiser les traumatismes du nerf saphène
interne à la jambe [9]. Il a également l’avantage de permettre une
incision prémalléolaire de petite taille (5 mm) laissant passer la tige
du stripper lors de la traction sur la veine. La veine est retirée par
l’incision malléolaire. Le stripper est retiré par l’incision inguinale
grâce à un fil de rappel fixé à son extrémité.
_ Éveinage par invagination
Il a été décrit par Van Der Stricht [49] qui a utilisé un fil. Il peut être
fait par un stripper semi-rigide sur lequel la veine saphène interne
est solidarisée par un fil. Une extrémité de ce fil est laissée longue
pour permettre de rappeler le stripper en cas de rupture de la
veine. L’éveinage est fait de haut en bas (fig 3). Pour éviter les
ruptures de veine qui sont l’inconvénient principal de cette
méthode [9], les collatérales mises en tension par la traction sont
sectionnées de proche en proche par des incisions faites en regard,
ou par une aiguille à injection intramusculaire. En cas de rupture
de la veine un éveinage par invagination est tenté de bas en haut.
Si une nouvelle rupture se produit, on fait un éveinage par
télescopage. L’éveinage par invagination réclame patience et
douceur. Il minimise le traumatisme des tissus cellulograisseux
sous-cutanés et donc diminue le volume de l’hématome
postopératoire. Il minimise également les traumatismes du nerf
saphène interne dus à l’éveinage qui n’ont été observés que dans
1,2 % des cas par Creton [9].
_ Éveinage saphène interne court
L’éveinage de la saphène interne est arrêté à la jarretière. La veine
est cathétérisée de haut en bas à partir de l’incision inguinale. avec
le stripper semi-rigide. Une contre-incision cutanée de 10 mm est
faite en regard de la tête du stripper repérée par la palpation. La
veine est disséquée, ligaturée en amont et incisée pour extérioriser
la tête du stripper. Les deux extrémités du stripper sont
solidarisées à la veine par des ligatures, la veine saphène interne
est sectionnée à ses deux extrémités et l’éveinage est fait de haut
en bas. Il peut être fait par invagination ou par télescopage. La
veine est extériorisée par l’incision de la jarretière, le stripper muni
d’un fil de rappel est retiré par l’incision inguinale (fig 3).
L’éveinage saphène interne court évite la zone de croisement du
nerf et de la veine saphène interne au tiers moyen de la jambe. Il
donne donc moins de traumatismes nerveux que les éveinages
longs. Dans deux séries d’éveinages avec olives semi-rigides,
Creton [9] a rapporté 9,6 % de lésions du nerf saphène interne après
éveinage long et 3,3 % après éveinage court. Cette proportion est
encore améliorée si on réalise des éveinages saphène interne courts
par invagination.
CROSSECTOMIE AVEC ÉVEINAGE SAPHÈNE EXTERNE
_ Crossectomie
La veine saphène externe se termine dans 60 % des cas par une
crosse dans la veine poplitée. Dans 30 % des cas, elle se termine
au-dessus du creux poplité dans la veine saphène interne, des
veines musculaires ou la veine fémorale. Dans 10 % des cas, elle se
termine au-dessous du creux poplité dans des veines
musculaires [11]. Cette grande variabilité de la crosse saphène
externe justifie le marquage préopératoire systématique par échodoppler
[1]. Le malade peut être opéré en décubitus ventral, genou
fléchi à 30° par un coussin placé sous la cheville ou en décubitus
latéral membre à opérer en position haute [41]. L’incision cutanée
est transversale. Elle mesure 3 à 5 cm. Elle est centrée sur le point
de repérage préopératoire de la crosse. L’aponévrose jambière est
incisée transversalement. La veine saphène externe est disséquée
et mise sur un lacs tracteur (fig 4). La crosse est libérée jusqu’au
niveau de la veine poplitée qui est d’accès difficile. L’écartement
est fait avec des écarteurs de Farabeuf maniés avec douceur. En
effet, les rapports de la crosse saphène externe avec le nerf sciatique
poplité externe sont étroits et ont été à l’origine de traumatismes
opératoires graves rapportés par Natali [38]. Les collatérales de la
crosse, en particulier la veine de Giacomini, et des veines jumelles
incontinentes pouvant naître de la crosse sont sectionnées entre
deux ligatures. La crosse est doublement liée au fil résorbable au
ras de la veine poplitée et sectionnée. En fin d’intervention
l’aponévrose jambière est fermée pour éviter les hernies souscutanées
de la graisse du creux poplité.
_ Éveinage saphène externe
Il est le plus souvent court et doit être tenté par invagination. Un
stripper semi-rigide est introduit de haut en bas dans la veine
jusqu’au tiers moyen du mollet. Une contre-incision de 10 mm est
faite en regard de la tête du stripper et l’éveinage est réalisé par
inversion de haut en bas. Le reflux dans le tronc de la saphène
externe est le plus souvent localisé à sa moitié supérieure [11]. Ceci
permet un éveinage court. Les éveinages saphène externe longs
exposent aux traumatismes du nerf saphène externe et ne doivent
être faits qu’en cas de reflux étendu au tiers inférieur de la veine [9].
Ainsi, Koyano [29] a rapporté 24 éveinages saphène externe longs
avec 20,8 % de lésion du nerf saphène externe et 20 éveinages
partiels avec aucune lésion nerveuse.
Pour faciliter cet éveinage saphène externe, Oesch [20] a décrit une
technique d’éveinage par perforation-invagination (PIN) qui
minimise l’abord proximal au mollet. Cette technique nécessite un
stripper rigide de 30 cm de longueur.
Gestes associés à l’éveinage
PHLÉBECTOMIES
Elles sont souvent associées aux éveinages saphène pour compléter
l’exérèse de leurs principales collatérales variqueux. Ces veines à
phlébectomiser sont marquées en préopératoire. La phlébectomie
est faite par de petites incisions cutanées de 2 à 4mm placées le
long du trajet de la veine (fig 2). La veine est saisie par une pince
de Halstead ou un crochet type crochet de Muller. Elle est
extériorisée de la plaie, saisie entre deux pinces et sectionnée. Elle
est libérée du tissu cellulograisseux sous-cutané vers l’amont et
vers l’aval par des tractions douces. La veine est ainsi libérée de
proche en proche sur tout son trajet et totalement excisée [41].
L’hémostase est obtenue par simple arrachement avec compression
digitale. Les incisions sont fermées par des Steri-stript. Muller [36] a
décrit une technique de phlébectomie ambulatoire au crochet qu’il
fait en complément d’une crossectomie éveinage saphène interne
court, quand l’axe saphène est refluant. La qualité des résultats
fonctionnels et esthétiques qu’il obtient semble être à la mesure de
l’exigence technique de la méthode. Large [32] a décrit une technique
de phlébectomie étendue à toutes les varices superficielles et aux
perforantes mais ménageant le tronc saphène interne. Il n’a fait la
crossectomie saphène interne qu’en cas de reflux clinique et a
obtenu 89,5 % de bons résultats à 3 ans.
LIGATURE DES PERFORANTES
Elle concerne les veines perforantes refluantes repérées et
marquées en préopératoire. Ces perforantes peuvent être centrées
sur un tronc saphène ou sur une collatérale saphène comme la
veine de Léonard [48]. L’exérèse du tronc saphène ou de sa
collatérale les déconnectera. La perforante peut être excentrée,
communiquant avec les troncs principaux par des collatérales, leur
abord direct avec exérèse des collatérales sera alors nécessaire [41].
Dans ce dernier cas, la perforante est abordée par une incision de 2
à 3 cm faite dans le sens des plis cutanés. Elle est liée sous le plan
aponévrotique et excisée avec ses collatérales. La ligature sousaponévrotique
des perforantes peut être faite sous endoscopie. Les
techniques sont variées [13, 19]. Les premiers résultats sont
encourageants [27] mais les bénéfices de ces méthodes et l’avantage
à les associer aux éveinages sont en évaluation.
Autres méthodes thérapeutiques
CURE CHIVA
Elle a été mise au point par Franceschi [15]. Elle cherche à rétablir
une fonction hémodynamique correcte dans le réseau veineux
superficiel en fractionnant la colonne sanguine et en déconnectant
les shunts veinoveineux. Elle préserve les veines saphènes interne
et externe. Elle est faite en ambulatoire sous anesthésie locale. Au
fur et à mesure de son évolution, cette méthode est devenue très
proche de la crossectomie saphène interne avec déconnexion des
perforantes [3] Les résultats n’ont pas fait l’objet d’une étude
prospective comparative avec les interventions conventionnelles [7].
CROSSECTOMIE
AVEC PHLÉBECTOMIE SAPHÈNE INTERNE
Elle peut être faite sous anesthésie locale, en ambulatoire. La
phlébectomie de la saphène interne est faite jusqu’à la jarretière.
Elle est associée à une phlébectomie des collatérales variqueuses.
Khan a montré dans une étude prospective randomisée [28] que
cette méthode diminuait la douleur et la surface des ecchymoses
postopératoires.
CRYOÉVEINAGE SAPHÈNE INTERNE
Il utilise une sonde au protoxyde d’azote dont l’embout atteint une
température de - 80 °C. Après crossectomie, la sonde est descendue
dans la saphène interne jusqu’au niveau souhaité. L’extrémité de
la sonde est refroidie ce qui la fait coller aux parois veineuses. Un
mouvement de traction brusque casse la veine dont l’hémostase
est assurée par le froid. On fait ensuite un éveinage par
invagination. Cette méthode évite une incision cutanée à la jambe
et minimise l’hématome postopératoire. Elle comporte cependant
un risque élevé de cryolésions des organes de voisinage. La
principale indication est l’éveinage saphène interne court [33].
Bandage et traitements
postopératoires
Une contention du membre inférieur doit être placée avant
l’éveinage, en ménageant les abords vasculaires, ou
immédiatement après l’éveinage. Cette contention minimise
l’hématome et l’oedème postopératoire. Creton [9] utilise deux
collants superposés, enfilés en salle d’opération, dont le plus
superficiel peut être enlevé si nécessaire. Muller [36] pose deux
pansements superposés. Le premier à compression modérée, le
second à compression forte qui peut être enlevé en décubitus. Cette
contention peut être faite par bandes élastiques à contention
moyenne (force II), placées des têtes métatarsiennes à la racine de
la cuisse. Durant l’intervention, les bandes sont posées sous
tension. Elles sont desserrées 6 heures plus tard. Cette contention
doit être parfaitement surveillée car elle peut produire des
compressions nerveuses, un syndrome du tarse [36] ou un syndrome
des loges [38]. En cas de plainte de l’opéré, la contention doit être
immédiatement enlevée, les pouls et la motricité des orteils vérifiés.
La bande ne pourra être replacée, que si l’examen clinique est
normal. La durée de la contention postopératoire n’est pas
consensuelle [1]. Elle varie de 8 jours à 1 mois. Elle n’est maintenue
que durant la journée. Le lever postopératoire doit être immédiat
avec reprise de la marche dès que possible. La prescription d’un
traitement antithrombotique postopératoire n’est pas
consensuelle [1]. Nous le faisons systématiquement à dose
prophylactique avec de l’héparine de bas poids moléculaire durant
7 jours. En cas de crossectomie saphène externe ou de ligature de
veines jumelles, dont le risque thrombotique est élevé, nous
maintenons un traitement antithrombotique 10 jours. Une
consultation postopératoire de contrôle doit être faite par le
chirurgien ou l’angiologue dans le mois suivant l’intervention. La
convalescence varie habituellement entre 8 jours et 3 semaines. La
sclérothérapie postopératoire est débutée 2 mois après
l’intervention.
Indications et résultats
Plus que sur des théories ou des convictions les indications
peuvent être basées sur des faits.
ARGUMENTS
La crossectomie est indiquée chaque fois qu’existe un reflux au
niveau de la crosse saphène interne ou saphène externe. Parmi
d’autres études celle de Jackobsen [26] est démonstrative. Il a fait de
façon prospective l’évaluation clinique à 3 ans de trois groupes de
malades. Les 157 malades traités par sclérose et compression
avaient de façon statistiquement significative des résultats objectifs
et subjectifs (36,6 et 70,5 % de bons résultats) inférieurs aux 165
malades opérés de crossectomie avec ligature de perforantes (65,2
et 84,8 % de bons résultats) et inférieurs aux 161 malades opérés
de crossectomie avec éveinage saphène interne, ligature de
perforantes et phlébectomies (89,8 et 93 % de bons résultats).
L’éveinage saphène interne est plus discuté. Sarin [46] a fait en 1992
une revue de la littérature. Parmi huit études contrôlées, dont
quatre prospectives, comparant les résultats des crossectomies avec
ou sans éveinage saphène interne, les taux de récidives ont été
globalement plus faibles dans le groupe avec éveinage (6 à 36 %
de récidives), que dans le groupe sans éveinage (11 à 60 % de
récidives). Il a fait une étude prospective comparative de ces deux
techniques en utilisant des critères de jugement objectifs, échodoppler
et photopléthysmographie. À 3 mois, il a observé 45 % de
reflux saphène interne au mollet dans le groupe crossectomie isolée
et 18 % dans le groupe crossectomie avec éveinage saphène interne.
Il n’a cependant pas pu répondre à la question du devenir
fonctionnel de ce reflux résiduel. Campanello [6] dans une étude
portant sur 18 malades a montré que plus que le tronc saphène
interne ce sont les perforantes laissées en place qui sont à l’origine
des échecs de la chirurgie des varices superficielles. Cette opinion
a été partagée par Fligelstone [14] qui a été favorable à la
conservation du tronc saphène interne à condition que les
phlébectomies « esthétiques » faites après un marquage veineux
précis aient enlevé toutes les perforantes incontinentes et leurs
veines superficielles de drainage. Cependant, il a étendu cette
phlébectomie aux troncs saphènes internes variqueux. Dans une
étude faite par échodoppler, 1 à 4 ans après crossectomiephlébectomie
sans éveinage saphène interne, il a trouvé 50 % de
veines saphènes internes utilisables pour un pontage artériel.
INDICATIONS
La chirurgie des varices n’est pas une urgence en dehors du
contexte particulier des phlébites superficielles étendues aux
crosses. Les contre-indications sont :
– les varicosités ;
– les veines dilatées non refluantes des sportifs ;
– les varices non compliquées de la femme enceinte ;
– les varices des femmes souhaitant une grossesse dans les 12 mois
suivant l’intervention chirurgicale projetée ;
– les varices des grands obèses qui doivent faire au préalable une
cure d’amaigrissement ;
– les varices au stade I, isolées et de petite taille, développées sur
collatérales de cuisse ou de jambe sans reflux de crosse ou de tronc
saphène associé.
Les indications sont représentées par les varices de stade I classe 1
ou de stade II classes 2 et 3 avec reflux de crosse ou de perforante
plus ou moins associé à un reflux de tronc saphène ou de
collatérales. Ce reflux doit être confirmé par échodoppler. Il doit
être prolongé et s’associer à une dilatation des veines refluantes.
En pratique, l’accord est établi pour qu’une incontinence de crosse
soit traitée par crossectomie chirurgicale. L’éveinage saphène
interne semble être la solution de sécurité pour éviter la récidive
par réactivation du tronc saphène interne restant. Cet éveinage sera
fait de préférence court, jusqu’à la jarretière et par invagination. Il
ne sera indiqué que si un reflux saphène interne tronculaire est
présent et s’associe à une dilatation de la veine. L’éveinage saphène
interne long sera réservé au reflux prolongé jusqu’à la cheville ou
limité à la cuisse mais avec perforantes centrées sur la saphène
interne au tiers moyen et au tiers inférieur de la jambe. L’éveinage
saphène externe sera limité aux segments refluants de la veine. Les
grosses collatérales crurales ou surales antérieurs ou postérieures
refluantes seront phlébectomisées, les perforantes de cuisse ou de
jambes refluantes seront liées après abords électifs. Dans la mesure
où la durée du geste est compatible avec le type d’anesthésie
utilisé, les deux membres inférieurs seront traités simultanément
(tableau II).
RÉSULTATS
Le taux de récidive après chirurgie des varices varie de 7 à 65%[46].
Cette variabilité s’explique par plusieurs raisons : la qualité du
bilan préopératoire, la qualité du geste chirurgical, le recul des
observations. Les résultats peuvent être améliorés à partir de
plusieurs objectifs. Diminuer la néogenèse à l’origine des
néocrosses saphènes [22], mieux reconnaître en préopératoire les
variations anatomiques des veines saphènes variqueuses, améliorer
la surveillance postopératoire. Les complications les plus
fréquentes de la chirurgie des varices essentielles sont les
hématomes, les infections minimes de plaie, les lymphorrhées au
Scarpa et les traumatismes du nerf saphène interne à la jambe [9].
Ces complications sont bénignes et leur fréquence diminue avec
une bonne technique opératoire.
Conclusion
La chirurgie est la meilleure méthode de traitement des varices
essentielles des membres inférieurs symptomatiques et de gros diamètre.
La crossectomie saphène interne ou saphène externe en est l’élément de
base. L’éveinage saphène interne ou saphène externe en présence d’un
reflux tronculaire important normalise la fonction veineuse. La
déconnexion des perforantes refluantes et dilatées, soit par éveinage soit
par ligature, complète les effets des crossectomies. La phlébectomie
améliore les résultats esthétiques et fonctionnels de la chirurgie. Ces
interventions fonctionnelles doivent être sûres et doivent donc être
pratiquées par des équipes formées et motivées à leur réalisation.
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Angéiologie Chirurgie des varices 19-4030
Jean-Pierre Chambon : Professeur des Universités, praticien hospitalier, service de chirurgie adultes
Ouest, hôpital Claude-Huriez, centre hospitalier régional universitaire, 59037 Lille cedex, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : JP Chambon. Chirurgie des varices. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-4030, 1997, 7 p.
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